Bail commercial et responsabilité du bailleur en cas d’incendie

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Qui doit payer les réparations en cas d'incendie ?

Tout dépend de la cause de l’incendie. Ainsi, les conséquences juridiques d’un incendie seront différentes si on est en présence d’un cas de force majeure, d’une cause indéterminée ou d’une faute du locataire.

Le cas fortuit ou la force majeure

En principe, l’article 1722 du Code civil dispose que lorsque le bien loué est totalement détruit par cas fortuit pendant le bail, ce dernier est résilié de plein droit, c’est-à-dire que le bailleur comme le locataire pourront mettre fin au bail sans intervention du juge. Lorsque le bien n’est qu’en partie détruit, seul le locataire pourra demander une diminution du prix ou la résiliation du bail. Dans tous les cas, aucune indemnisation n’est versée.

Toutefois, cet article ne s’applique qu’en cas fortuit, que la jurisprudence judiciaire assimile aujourd’hui au cas de force majeure. L’article 1248 du Code civil le définit comme un évènement “échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées”. Il faut ainsi que l’évènement soit :

  • Irrésistible : L’évènement doit être insurmontable, c’est-à-dire qu’il était impossible d’y résister. C’est le cas par exemple des catastrophes climatiques ou des évènements politiques majeurs.
  • Imprévisible : L’évènement ne devait pas être prévisible au jour de la conclusion du contrat. Ce critère est apprécié d’une manière assez souple par le juge, qui considère parfois que l’évènement bien que prévisible, relève de la force majeur car il était impossible de s’y soustraire.
  • Extérieur : L’évènement ne doit pas être causé par le fait ou l’état des parties au contrat. Toutefois, en matière contractuelle, ce critère a également été apprécié avec une certaine souplesse par le juge, notamment lorsque le débiteur de l’obligation tombe malade par exemple. La maladie n’est pas extérieure aux parties mais était imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible au débiteur.

Or, la jurisprudence s’est déjà prononcée plusieurs fois dans le cadre d’un incendie et elle rejette souvent la qualification du cas fortuit. Il faudra distinguer en fonction des circonstances de l’incendie.

Présomption de responsabilité du locataire

L’article 1733 au contraire porte une présomption de responsabilité sur le locataire en cas d’incendie. La jurisprudence à notamment établie que lorsque la cause de l’incendie n’est pas déterminée, cela ne suffit pas a caractériser la force majeure et le locataire en sera tenu responsable vis-à-vis du bailleur.

De même, dans le cas d’un incendie criminelle qui a causé la destruction du local commercial, le locataire n’est pas en principe exonéré de responsabilité du fait de la nature criminelle de l’incendie. Il faudra que l’incendie présente les caractères de la force majeure. Ainsi, si il a été facilité par une faute ou une négligence du locataire ou si il a été causé par un employé de l’exploitant, la force majeure ne pourra pas être retenue.

Exonération de responsabilité du locataire

Le même article 1733 précise que le locataire pourra se dégager de sa responsabilité si il parvient a prouver au moins un de ces éléments :

  • Cas fortuit : C’est le cas le plus évident, le locataire ne peut être tenu responsable dans un cas de force majeure. Toutefois, il peut être très difficile de prouver que l’incendie relève de la force majeure, d’autant plus que les causes d’un incendie sont souvent difficiles à déterminer avec certitude. Dans ce cas, si l’incendie a détruit tout le local commercial, le bail est résilié de plein droit et le locataire n’aura droit à aucune indemnité, y compris l’indemnité d’éviction. Si le local est seulement en partie détruit, le locataire pourra demander une réduction du loyer ou la résiliation du bail. La distinction est souvent difficile a établir entre un local totalement détruit et un local partiellement détruit, c’est pourquoi l’accompagnement d’un avocat expert en baux commerciaux peut s’avérer précieux.
  • Vice de construction : Si l’incendie relève d’un vice de construction de l’immeuble (mauvaise installation électrique, chauffage défectueux…) le locataire ne pourra pas être tenu responsable de l’incendie. Le bailleur devra indemniser le locataire sur le fondement de l’article 1719 du Code civil qui garantit au locataire l’usage paisible de la chose louée. Il pourra ensuite tenter de se retourner contre le constructeur s’il bénéficie toujours de la garantie décennale.
  • Communication d’une maison voisine : Le locataire ne pourra pas être tenu responsable d’un incendie qui a démarré dans un immeuble voisin et qui s’est propagé jusqu'à son local. Dans ce cas, à l’image du vice de construction, il devra indemniser le locataire et pourra ensuite se retourner vers le responsable de l’incendie si il est possible de l’identifier.

Qui paie le loyer en cas d’incendie ?

Il faut distinguer si le local a été entièrement détruit ou non :

  • Si le local est entièrement détruit, le bail est résilié de plein droit est le locataire n’est plus tenu de verser les loyers, quelque soit la cause de l’incendie. Il sera toutefois responsable de l’incendie si il ne parvient pas à prouver les situations décrites ci-dessus.
  • Si le local n’est que partiellement détruit, le locataire devra toujours s’acquitter des loyers puisqu’il pourra toujours exploiter le local.

 ? Le locataire et le bailleur peuvent ne pas être d’accord sur l’étendue des dommages. Le locataire pourra considérer que le local est entièrement détruit tandis que le propriétaire pourra considérer que la destruction n’est que partielle et continuera d’exiger les loyers. C’est pourquoi il est préférable d’être accompagné par un conseil juridique qui vous aidera, dès la rédaction du contrat de bail, à prévoir les règles applicables par la suite et à régler les litiges y afférant.

Mon assurance peut-elle me rembourser les dommages causés par un incendie ?

En matière assurantiel, il est nécessaire de toujours maitriser le contrat qui a été conclu avec l’assureur. En effet, le contrat peut prévoir que les incendies ne sont remboursés que sous certaines conditions, qui excluent par exemple les incendies volontaires. Il faudra donc être très attentif aux stipulations contractuelles.

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